Le Château de Lunéville mérite mieux

 

Session publique du 3 février 2020

Intervention de Luc BINSINGER :

Conseiller départemental du canton de Jarville-la-Malgrange

 

Monsieur le Président,

Chers collègues,

 

Enfin !…C’est en effet le premier mot qui vient à l’esprit alors que nous sommes rassemblés dans la chapelle du Château pour envisager son avenir !

Enfin !…20 ans après le rachat du château par le Département !

Enfin !…17 ans après l’incendie !

Enfin !…Non pas le bout du tunnel, mais un début du commencement !

Enfin !…Il aura fallu des élections en mars 2020 pour que  l’on s’y déplace extraordinairement !

Je voudrais tout d’abord remercier les équipes administratives qui ont su étayer, organiser, présenter dans un délai précipité ce rapport  sur lequel nous nous appuierons pour faire revivre le Château durant les 15 voire les 20 années à venir !

Cette renaissance proposée est prévue en  3 actes, dont le 1er débute dès cette année.

Nous nous en réjouissons, mais nous aurions aimé nous en réjouir plus tôt !

Il y a déjà un vrai regret, et il est parfaitement traduit dans le rapport que vous nous présentez : L’acte Zéro. Oui Monsieur le Président, depuis bien des années, il y a eu de la part de vous-même et de votre majorité : Zéro Acte !

J’en veux pour preuve, Monsieur le Président, que si la Chambre régionale des comptes n’était pas venue vous gronder parce que l’argent des donateurs dormait toujours à la fondation du patrimoine, vous n’auriez toujours pas engagé la restauration du Grand Escalier Nord. Quelle tristesse ! Où est le simple respect dû à ces généreux donateurs ?

J’en veux également pour preuve, Monsieur le Président, que le département de Meurthe-et-Moselle n’aura pas investi ne serait-ce qu’un centime d’euro sur le Château de Lunéville, vous vous êtes en effet contenté, comme votre prédécesseur, de dépenser l’argent de l’assurance ! Et cela continue ! Puisque les 8M€ d’autorisation de programme que nous nous apprêtons à voter correspondent au reliquat ce cette même assurance !

J’en veux toujours pour preuve, Monsieur le Président, que la sempiternelle excuse réchauffée et réutilisée à outrance, notamment par notre collègue Nicole Creusot, de la propriété du Ministère de la Défense sur les appartements ducaux, ne vous empêchait en rien de lancer des travaux de restauration qui devaient de  toutes façons être lancés ! Le triste état des cours, des huisseries, des façades des communs et du corps central côté jardin en témoignent ! Et que dire de l’installation devant la porte du commun nord, Cour du Rocher, dont on devine qu’elle sert à protéger d’éventuel passant des chutes de pierres et d’éléments sculpturaux ! Vraiment, monsieur le président, cela fait mal au cœur !

A l’inverse vous avez su trouver  rapidement 1 millions d’euros quand il a été question de racheter et de rénover l’ancien hangar de Métal Est dont on ne sait toujours pas quelle est son l’utilité !

Le château de Lunéville méritait beaucoup. Mais force est de constater que depuis votre arrivée à la présidence du département en mars 2014 rien n’a vraiment bougé. Aucun acte de restauration n’a été livré.

Oui Monsieur le Président, Acte Zéro, pour Zéro acte de votre part, c’est dommage ! Voilà pour le passé.  Abordons maintenant l’avenir !

Tout grand projet s’inspire ou doit s’inspirer de la dimension philosophique. Force est de constater cet « oubli » souligné fort justement par notre collègue Patricia DAGUERRE en commission élargie.

Le calendrier prévisionnel des investissements est imposant, parait enfin précis et s’étale jusqu’en 2035. Evidemment, ce genre de chantier connait des aléas et connaitra certainement du retard, c’est normal ! Espérons cependant que le château ne subisse pas le même sort que le Plan Collège Nouvelle génération dont la durée a doublé !

Espérons également, que l’architecture relationnelle entre la maitrise d’ouvrage, la maitrise d’œuvre, les organismes de contrôle, de sécurité  et les entreprises ne soient pas un deuxième mauvais exemple départemental après le Centre Des Mémoires !

Sur la partie historique, beaucoup de restaurations sont annoncées mais il reste néanmoins des interrogations sur les espaces historiques majeurs. A l’image de la «table volante », quels sont les espaces qui ne seront pas restaurées ? Quelles est la position de l’Etat sur l’occupation de services dans les espaces préservées ? Je fais notamment allusion au positionnement du café brasserie Lounge…

Sur les modalités opérationnelles, comment va se prolonger la mission de préfiguration ? Comment cela va impacter l’équipe actuelle travaillant au château ? Quel va être le calibrage des moyens humains eu égard à la montée en charge ? Cette absence dans le rapport pourra être ressentie comme du dédain par les personnels !

Puisque nous en sommes aux rapports humains, je voudrais évidemment appuyer et évoquer quelle sera le niveau d’implication et de concertation des associations présentes au Château mais aussi la vocation de l’association de préfiguration ? Quel sera son objet ? de gouvernance ? sa présidence ? Quelle politique touristique et de communication va être déployée pour atteindre les objectifs dignes du Musée des ducs à Dijon ou du Château de Versailles ?

Toutefois, je voudrais justement m’attarder sur la partie financière :

  • Quelle sera la part net d’investissement du Département ? 8 Millions puis 38 Millions puis 83 Millions d’euros, certes l’Etat semble s’engager à hauteur de 20 % mais l’état n’interviendra QUE sur le part restauration Monuments Historiques
  • La région Grand Est ne s’est engagée QUE sur la durée du mandat. La Région Grand Est n’est pas propriétaire, elle ne s’engagera que projet par projet.
  • Enfin, il n’aura échappé à personne que la partie «recettes actuelles » est totalement occultée dans les tableaux annexés au présent rapport.
  • Absence totale de la partie mécénat

Mécénat !

Monsieur le Président, c’est vous-même qui disiez qu’on ne pouvait plus concevoir un tel projet sans le privé. Que s’est-il passé depuis ? Notre collègue Manuela Ribeiro a-t-elle plus d’influence sur vous que nous ne le pensions ! Dans le projet tel qu’il nous est présenté l’arrivée éventuelle d’une entité privée n’apparait que comme hypothétique. Pourtant Monsieur le Président nous devrons bien passer par là. C’est une évidence !

Le festival est une idée intéressante, mais il est impossible aujourd’hui de nous faire une idée de ce qu’il sera réellement et concrètement ! La direction artistique n’est pas encore recrutée et ne peut donc rien nous présenter ! Attendre quelques mois supplémentaires aurait permis de nous faire une idée plus précise du projet.

Beaucoup de temps a été perdu ! Alors que vous auriez dû impulser une dynamique en lançant un investissement massif pour cet Acte 1, vous vous contentez du strict minimum syndical.

Enfin de nombreux aspects continuent de ne pas figurer dans votre perspective.

  • Ainsi, comme l’a souligné notre collègue Patrick BLANCHOT, Lunéville, cité cavalière par excellence doit s’insérer dans la filière équine qui tient une place importante dans notre département.
  • Nous observerons également aucune approche Muséale fort dommageable pour un édifice et un site de cette envergure.

Pas d’approche philosophique, pas de référence à la cité cavalière, aucune dimension muséale ! 

L’engagement politique est aussi absent ! Il est clair que ce château, il ne vous intéresse pas. Votre recherche d’une « nouvelle gouvernance » le montre. Cette nouvelle structure multi partenariale est-elle la bonne solution pour faire renaître le Château ? Je ne le crois pas !

Si toutefois  vous prévoyez que le département garde la mainmise sur la structure, alors, en définitive, elle est inutile ! car :

  • C’est au propriétaire de donner les impulsions.
  • C’est au propriétaire d’assumer son projet !
  • C’est donc au propriétaire d’en assurer le pilotage !

Propriétaire, vous n’avez rien fait !

Propriétaire, vous n’avez pas assumé !

L’histoire eut été certainement différente si ce Château était situé à Nancy ! Votre désintérêt, montre une fois de plus combien, l’équité territoriale n’a pas été respectée par cette majorité départementale.

Nous attendions un projet précis. Force est de constater que ce qui nous a été présenté reste finalement très vague !

Résumons la situation :

  • Une restauration qui démarre timidement, sans engagement financier du département autre qu’une ligne financière qui est en réalité le reliquat de l’assurance.
  • Un festival dont on ne mesure ni les tenants et ni les aboutissants
  • La quasi disparition de l’arrivée d’un investisseur privé.
  • L’absence des repères primordiaux liés à la philosophie des lumières, à la cité cavalière et  la dimension Muséale.

C’est dommage Monsieur le Président !

Sans doute aurait-il fallu attendre quelques semaines supplémentaires pour une présentation plus aboutie !

Mais cela ne s’insérait pas dans votre calendrier. Il fallait absolument faire de la communication, tenter un buzz en instaurant précipitamment une session extraordinaire délocalisée.

En ce début février, vous avez souhaité troquer votre roulotte de campagne pour un après-midi  au château.

Le château de Lunéville, méritait mieux,  c’est dommage de l’utiliser, de l’instrumentaliser ainsi !

Il méritait un projet précis, ferme et ambitieux

Il méritait mieux qu’une opération de communication du candidat à la Mairie de Nancy !

Pour toutes ces raisons, vous comprendrez que le groupe de l’Union de la Droite et du Centre votera contre ce rapport !

Je vous en remercie.

Luc BINSINGER

 

 

Réponse de Christian ARIES

Vice-Président délégué aux Finances, aux budget et aux relations transfrontalières

Je ne suis pas sûr qu’il faille intervenir. J’étais de ces 5 ou 6 élus qui sont autour de la table qui étaient présents en 2003 quand il y a eu l’incendie. Jean-Pierre MINELLA, Alain CASONI, Jean LOCTIN, Michèle PILOT, moi-même, Jacques LAMBLIN et d’autres peut-être dans le public. Et donc j’ai malheureusement connu l’état des lieux de cet incendie. Nous avions reçu, du Conseil Départemental de l’époque, la garantie que l’assurance que nous percevrions suite à l’incendie serait consacrée dans son intégralité à la réfection de ce château.

Je constate (certes, peut-être que cela n’est jamais assez rapide) qu’aujourd’hui près de 17 millions d’euros ont été engagés sur les 26 millions d’euros qu’a apporté l’assurance. Ce qui n’est quand même pas neutre. Comme l’a dit tout à l’heure Serge de CARLI, un certain nombre d’élus ici autour de la table viennent d’autres territoires et ils auraient bien aimé que d’autres opérations soient aussi accompagnées, aussi fortement par le Département puisqu’à l’époque on évoquait le développement de six sites structurants sur l’ensemble du territoire.

Malheureusement, depuis 2003, la situation a fortement changé du fait notamment du transfert de compétence de la part de l’État non compensé, ce qui a fait que le Département a dû faire des choix budgétaires drastiques. Malgré ces choix budgétaires drastiques, le Département, que ce soit sous la houlette de Michel DINET ou de Mathieu KLEIN, a décidé de continuer à maintenir l’engagement de consacrer ces 26 millions d’euros de l’assurance pour la rénovation et la réfection de ce château. Aujourd’hui, nous avons un projet. Il a été à plusieurs reprises demandé par les uns, par les autres. Combien de fois l’avons-nous évoqué en session. Il y a un projet global qui est partagé par nos partenaires, il se déroule en plusieurs étapes, parce qu’on sait bien qu’aujourd’hui, avec un projet à 10 ans ou à 15 ans il n’y aura plus forcément les mêmes partenaires autour de la table (ceux-ci ne peuvent pas s’engager sur des durées aussi longues). Mais il y a un objectif, il y a effectivement des projets qui sont autour de ce château sur les 10 à 15 ans qui viennent, de 129 millions d’euros au total, et qui vont permettre de faire de ce château un lieu touristique majeur pour le lunévillois, bien sûr, mais comme l’ont dit d’autres autour de la table pour la Meurthe-et-Moselle, la Lorraine et la région Grand-Est et l’ensemble, même, de la région Grand-Est si on prend en compte nos voisins allemands, belges et luxembourgeois. Donc ce projet va dans le bon sens, se fait progressivement par étape, en tenant compte de nos contraintes financières, en prenant en compte une première enveloppe de 8 millions d’euros, qui est réaliste, qui peut se faire dans le contexte actuel. Je vous rappelle que demain le Département ne touchera plus la taxe sur le foncier bâti et qu’elle n’aura plus aucune autonomie fiscale et qu’elle dépendra entièrement de la part de de dotations de l’État.

Néanmoins, dans ce cadre-là, nous avons décidé de proposer ce projet de développement pour le lunévillois et l’ensemble du département. Je crois que c’est une bonne chose, même si je souhaiterais, évidemment que cela puisse se faire également sur d’autres territoires. Mais c’est une autre histoire.