Budget 2025

Session publique du 2 avril 2025

Intervention de Christopher Varin

Président du groupe UDC, Conseiller départemental du Canton Lunéville – 1

Christopher Varin, Conseiller Départemental Canton Lunéville -1

Madame la Présidente,
Mes cher(e)s collègues,

Si c’est une première pour moi comme président de l’UDC, c’est déjà votre 4ème séance budgétaire comme présidente de l’assemblée départementale Madame la Présidente !

4ème séance mais toujours avec la même programmation, le même scénario et les mêmes acteurs depuis 4 ans. C’est un peu comme la vieille politique qui ne cesse de lasser les Français. Les élus se succèdent, les discours se succèdent, les mêmes mots se succèdent et rien ne change. La France persiste dans les déficits qui se creusent, notre dette s’alourdit d’année en année et on fait croire à des Français qui ne sont pas dupes que les impôts et l’argent public magique sont la solution miracle à tous nos maux. En Meurthe-et-Moselle, le recule démographique, l’absence de stratégie économique pertinente et l’effondrement de nos marges de manœuvre budgétaires sont constants depuis 30 ans. Le constat est simple, même lorsque vous avez les leviers entre vos mains à la ville de Nancy et à la Métropole, les poumons économiques de notre territoire, rien ne change.

Vous dressez un décor sombre où l’Etat est jugé responsable de tous vos maux !

Vous initiez toujours cette musique lancinante où vous êtes victime des pires sanctions financières pour justifier votre immobilisme.

Votre majorité se pose même des questions à elle-même générant des dialogues convenus où vous vous considérez comme les meilleurs gestionnaires et visionnaires ! Mais lorsqu’on voit le bilan économique et démographique de notre département depuis 30 ans, permettez nous d’en douter.

Le scénario dévoilé lors du traditionnel débat d’orientation budgétaire s’affiche désormais dans un long storyboard de 36 scènes (rapports) bien connues maintenant !

A chaque séquence de votre long métrage, vous rappelez le contexte national, les décisions de l’Etat qui s’imposent à vous et les difficultés que vous avez à financer celles-ci, sans jamais faire ce qu’il faut pour reprendre le destin économique de notre département en mains. Nous ne vous entendons jamais dire comment attirer de nouvelles filières économiques, de nouvelles entreprises créatrices d’emplois. Vous vous contentez de commenter, de subir, de dénoncer, de manifester, sans jamais gouverner le destin de notre territoire.

A chaque scène de ce long métrage, vous maintenez les effets d’annonces aux meurthe-et-mosellans depuis 4 ans, sans jamais dresser le bilan de vos politiques publiques ! Vous annonciez un plan de lutte contre la pauvreté ? Les associations qui œuvrent dans le domaine sont unanimes pour dire qu’il y a toujours autant de personnes souffrant de la pauvreté en Meurthe-et-Moselle. Vous parlez de plans locaux d’insertion sans avoir de baisse significative du nombre de bénéficiaires du RSA grâce au retour à l’emploi. Vous commentez les difficultés de recrutement dans différents domaines, sans jamais apporter de solutions crédibles, vous renvoyez toujours la balle à l’Etat. C’est un peu facile.

A chaque mot de ce long métrage, vous minimisez les recettes attendues et, pour une fois, depuis 30 ans, vous ajustez enfin les inscriptions budgétaires au plus près des dépenses constatées ! Parce que la situation vous l’imposait.

Le titre de ce film budgétaire aurait dû être : « la question n’est plus « combien » ? la question n’est plus « comment » ? la véritable question désormais est « qui » ?

En décembre dernier, vous avez répondu pour partie à cette question … en supprimant pour les personnes âgées à domicile, les aides de l’APA, celles pour le portage des repas et la téléassistance !

2.900 de nos ainés choqués et déstabilisés, juste avant les fêtes, 900.000 € économisés pour les caisses du Département !

Envoi trop rapide ! Maladresse administrative ! Mea culpa ! Rétropédalage ! provoquant l’émoi et l’indignation des familles, des structures d’accompagnement ; CCAS, ADAPA, ADMR et des syndicats concernant la mise en cause des agents de notre collectivité quand on sait que ce sont près de 6.000 lettres qui ont été adressées aux bénéficiaires !

Depuis, vous n’êtes pas avares de communication pour dissiper l’inacceptable et tenter de tromper l’opinion publique allant même jusqu’à traiter les élus de notre groupe de « voleur » et nous accuser de « singer » le rassemblement national ! C’est inacceptable, les Meurthe-et-Mosellans ne sont pas dupes mais là, les bénéficiaires et leurs familles seront vos seuls juges, Madame la Présidente !

Tout comme l’ensemble des personnes âgées qui vivent à domicile pour lesquelles vous amputez le budget alloué à l’APA à domicile de 5,4 M€ dans un contexte où la demande de maintien à domicile est largement majoritaire dans la population. 94 % des Français (étude de l’IFOP) souhaitent vieillir chez eux. Une décision à contre sens du discours qui veut qu’on favorise le maintien à domicile de nos aînés sachant très bien que les places sont limitées et couteuses en établissement ! Madame la Présidente, cette décision est consternante !

Il n’y a pas d’ambiguïté : en 2025, le maintien à domicile est sacrifié. On coupe sur les services de proximité, la téléassistance, les aides à domicile, pendant que l’on maintient des lignes budgétaires inchangées ailleurs. Le signal est clair : la personne âgée, isolée, dépendante, n’est plus une priorité de votre majorité.

Le vote du budget est l’acte politique le plus fort de notre assemblée. Il reflète la vision que nous avons de notre collectivité, de ses priorités, de ses choix. Et c’est pourquoi nous tenons, une fois encore, à dire que ce budget 2025 n’emporte pas nos votes !

Nous ne pouvons y souscrire, car il porte les marques d’un déséquilibre profond : entre les discours d’alerte et une réalité financière beaucoup moins sombre ; entre les écarts affichés et les recettes réelles ; entre les besoins du terrain et les choix budgétaires opérés !

Il y a encore peu, vous évoquiez un « trou » de 110 millions d’euros, dû au désengagement de l’État. Un scénario catastrophe.

Et pourtant, les chiffres sont là : les recettes de fonctionnement sont maintenues à hauteur de 804 millions d’euros, les dépenses de fonctionnement ont été enfin ajustées aux dépenses constatées à 780 millions.

Quant au fonds de réserve constitué avec les excédents précédents, ce sont 7,3 M€ qui sont débloqués (sur le 37,8 M€), grâce aux contributions payées par les accédants à la propriété.

Le poisson d’avril budgétaire, annoncé comme indigeste, a été plutôt facilement digéré.

Mais au lieu de saisir cette marge pour répondre aux urgences sociales, ce budget fait des choix discutables.

D’abord, il confirme l’augmentation d’un impôt départemental, avec la hausse du taux des droits de mutation à titre onéreux, de 4,5 % à 5 %, alors même que les habitants font face à un contexte immobilier difficile. Une mesure prise avant même le vote du budget, preuve d’un entêtement fiscal que nous avons clairement rejeté. Comment imaginer un redémarrage rapide des DMTO en chargeant un peu plus la barque des accédants à la propriété ?

Nous devons aussi dénoncer l’insincérité manifeste du budget des AIS. Le reste à charge des allocations individuelles de solidarité est volontairement surévalué ; par exemple par l’ignorance de la règle « Jospin » pour l’APA ! Cela permet à la majorité de dramatiser artificiellement la situation pour justifier des coupes et de nouveaux dispositifs idéologiques. C’est une construction budgétaire que nous ne pouvons pas cautionner.

Dans le champ de la jeunesse le Département s’entête à maintenir un revenu d’émancipation jeunes sans contrepartie, pour un coût annuel d’un million d’euros. Ce dispositif est contesté dans sa philosophie, dans son efficacité, dans son équité, mais il est reconduit, par principe. Jusqu’à aujourd’hui votre majorité prétend que pour elle, le travail n’est pas une fin en soi dans notre société. C’est là toute notre différence.

Toutes les grandes civilisations de l’histoire de l’humanité ont travaillé pour nous offrir l’écriture, l’agriculture, l’architecture, la culture, la musique, la langue, ou même la révolution industrielle et les 30 glorieuses qui ont permis l’avènement de notre modèle social. Si vous proposez des alternatives au travail aux nouvelles générations en leur offrant un revenu totalement déconnecté de toute obligation en lien avec le travail nous ne pourrons y souscrire. Mais nous sommes prêts à vous aider dans toute ce qui permettra d’accompagner notre jeunesse sur le chemin du travail.

Vous avez raison, ce sont deux modèles de sociétés qui s’affrontent dans cette salle, même si les débats de ce matin ont été plus ouverts et apaisés que d’habitude, les Français comme les Meurthe-et-Mosellans qui travaillent en ont assez d’être les seuls à porter notre société pour soutenir un modèle social devenu difficile à financer. Nous devons absolument éviter la rupture brutale de notre contrat social. Si la population active cesse de consentir à la solidarité car elle serait écrasée nous perdrons tout.

Et nous pensons que pour surmonter les murs démographique, climatique, financiers des prochaines années, tous les français devront se remonter les manches et travailler plus pour ne pas transmettre une épave en guise de pays à leurs enfants.

Kofi Annan parlait de notre génération comme de la « première génération sans héritage ». Nous ne sommes pas loin de penser la même chose que lui, à ceci prés que le seul héritage que recevra cette génération ce seront des dettes. Des dettes comptables, des dettes morales et dettes climatiques. Nous devons absolument travailler tous ensemble pour éviter cela.

De même, l’accueil inconditionnel des mineurs non accompagnés continue, et nous coûte aujourd’hui aux Meurthe-et-Mosellans 16 millions d’euros. Aucune remise à plat, aucun débat de fond. Là encore, les moyens sont là, mais les priorités sont ailleurs. Nous ne pouvons pas parler de ce sujet sans nous faire qualifier d’extrémistes mais nous rappelons que notre groupe appelle l’Etat à reprendre cette compétence qui ne devrait pas être supportée par les départements. Nous n’avons aucun contrôle sur les flux de jeunes abimés par la vie qu’on impose de prendre en charge.

Nous devons également souligner le rapport accablant de la chambre régionale des comptes sur la gestion des contrats jeunes majeurs, dispositif extra-légal financé par le Département à hauteur de 6 M€ par an. Les magistrats pointent une gestion opaque, une évaluation absente, un suivi insuffisant, et des conditions d’hébergements qui enfreignaient la loi. Quatre injonctions ont été adressées au Département. Ce n’est pas un détail. C’est une alerte institutionnelle grave. Lorsque c’est notre groupe qui vous le dit vous criez à la manœuvre politique, lorsque ce sont des magistrats c’est plus difficile à contester.

Autre exemple d’injustice territoriale : le financement de la Maison des Femmes à Nancy. Projet, que nous ne contestons pas dans son principe, porté par la Ville de Nancy, a reçu une première subvention de 420 000 €, à laquelle s’est ajoutée une rallonge de 131 500 €. Soit plus de 550 000 € pour une seule commune, au détriment des autres communes de la Métropole qui voient leurs crédits territoriaux amputés d’autant. Ce n’est pas un refus de soutenir cette structure utile, mais une dénonciation du déséquilibre évident dans la répartition des moyens. C’est cela, aussi, l’iniquité territoriale.

Enfin, je veux dire un mot de méthode. L’automne dernier, notre groupe a proposé une main tendue à la majorité, pour co-construire un budget de responsabilité. Nous n’avons reçu comme réponse qu’ignorance et mépris de la part de votre exécutif !

Madame la Présidente, nous l’avons entendu, cela nous a été dit, ce budget primitif 2025 est un budget trimestriel, voire semestriel ! Un budget « d’ajustement » interviendra en juin ou septembre afin peut être d’élaguer certaines promesses, sans débat démocratique digne de ce nom comme d’habitude.

Mes chers collègues de la majorité, ce budget 2025 est marqué du sceau de vos décisions politiques et unilatérales !

Il favorise des dispositifs coûteux et idéologiques, tout en réduisant l’effort sur les politiques de proximité. Il sacrifie la prévention, le maintien à domicile, et l’équilibre territorial.
Il repose sur une architecture insincère, exagérée idéologiquement ici et sous-évaluée volontairement là, à dessein de nourrir un discours d’austérité qui ne correspond pas à la réalité des chiffres. Nous le verrons rapidement lors du compte administratif, là encore, comme d’habitude !

C’est pourquoi l’ensemble des conseillers départementaux de l’UDC vont voter contre cette « phase une » du budget 2025.

Christopher VARIN