Session budgétaire du 14 mars 2016.
Intervention de Thibault BAZIN :
(Conseiller départemental du canton de Lunéville 2)
Monsieur le Président, Madame la vice-présidente, mes chers collègues,
Le 25 novembre dernier, je nous invitais à résister ensemble pour assurer un avenir à tous nos territoires. L’aide à l’investissement pour les communes représente un véritable effet de levier à saisir en cette période de crise économique durable, afin de relancer l’investissement local.
Les maires de Meurthe-et-Moselle attendaient ce rapport avec impatience. Je suis sûr, Monsieur le Président, que vous n’avez pas oublié que je rêvais de pouvoir dire avec vous « Yes, we can ! ». Au final, « we can » pas du tout…
Qu’est-ce qui change pour les communes ?
Avant les territoires bénéficiaient par les précédents contrats de 20M€/an en investissement au titre de la dotation d’accompagnement des projets (la DAPRO). C’était un dispositif critiqué pour son opacité. Le nouveau rôle que vous donnez, Madame la Vice-Présidente, est une très bonne avancée. Vous confirmez ce dispositif avec un montant de 23M€ sur la durée du CTS soit 3,8M€/ an.
Je souhaitais vous alerter sur un risque réel d’une inéquité territoriale, renforcé par des communes totalement oubliées des commissions territoriales puisque leurs conseillers départementaux n’y ont pas le droit de vote. Imaginez que la moitié des habitants du canton de Lunéville 1 sont dans ce cas.
Avant les communes bénéficiaient aussi de la dotation communale d’investissement, cela représentait 11,2M€/an. C’est totalement supprimé.
Avant la quasi-totalité des communes bénéficiaient aussi d’une dotation de solidarité, cela représentait au total 2,3M€/an. C’est désormais limité à 273 communes et pour un montant total de 6M€ pour la durée du CTS, soit 1M€/an.
Imaginez qu’une commune de 490 habitants aura droit à 1 333€ de subvention annuelle… mais que le maire se rassure, il sera accompagné en ingénierie. Et c’est apprécié par maintes communes. Enfin vous savez : même avec une belle voiture, sans essence, on ne va pas très loin. Dit autrement, avec si peu d’aide, cela ne servira à rien par certaines communes fragiles d’avoir des experts techniques qu’il faudra se payer – même pour des sommes modiques.
Pour sélectionner les 273 plus fragiles – d’ailleurs pourquoi pas 274 ? – vous avez utilisé des critères de péréquation qui me laissent dubitatif. Quelles bases de données vous ont permis de juger la part de la population non diplômée ou la part de cadre et professions intellectuelles supérieures ?
Pour que cela soit juste, il aurait fallu le même point temporel pour comparer. Or, les enquêtes INSEE n’ont pas lieu dans toutes les communes au même moment.
Madame la vice-présidente, pourriez-vous nous transmettre le tableau ainsi que les sources ayant procuré les données vous permettant de classer ou déclasser telle ou telle commune. Tout cela pourrait s’avérer contestable et arbitraire sans des éléments plus probants. Donnez au « T » de CTS un peu plus de transparence…
En résumé, vous passez donc en matière de soutien à l’investissement pour les communes, d’un total de 33,5M€/an à un total de 4,8M€/an. C’est ce qu’on appelle une baisse DRASTIQUE de l’appui aux territoires. Près de 85% de diminution du soutien à l’investissement pour les communes.
Monsieur le président, Madame la vice-présidente, Je suis étonné par le fossé entre les mots utilisés et la réalité.
Vous dites que le CTS « confirme l’engagement de la collectivité départementale aux côtés des maires ». Vous dites que la Meurthe-et-Moselle « fait le choix de poursuivre son soutien ». Vous dites que « le CTS veut donner les moyens d’agir ».
Il faut appeler un chat un chat. Quand on ne fait plus que 15% d’une politique, c’est votre choix et vous avez vos raisons, il serait plus juste de parler de désengagement de la collectivité départementale aux côtés de la plupart des maires.
Avec 85% en moins d’aide directe à l’investissement des communes, il y aura moins d’investissement local dans les territoires, donc moins d’emplois dans le BTP… ce n’est pas comme cela qu’on va réduire le nombre de bénéficiaires du RSA et faciliter l’insertion professionnelle.
La désespérance républicaine se nourrit dans le terreau du chômage, de l’abandon ressenti dans les territoires. Si vous vouliez vraiment une reconquête républicaine des territoires, si vous vouliez vraiment utiliser les leviers d’actions à votre disposition pour soutenir les territoires par notamment l’activité économique, alors il fallait revoir votre copie avec un véritable plan Marshall de relance de l’investissement local sur tous les territoires.
Ce CTS ne nous fait pas rêver, c’est même un profond désenchantement.