Nous appelons de nos vœux un travail concerté avec les représentants de tous les cantons

 

Session publique du 21 mars 2022

Intervention de Thibault BAZIN :

Conseiller départemental du canton de Lunéville-2

Madame la Présidente,

Chers collègues,

 

Près d’un an après le renouvellement prévu de l’assemblée départementale, vous nous présentez enfin votre projet pour les 6 années restantes, après le vote du premier budget du mandat.

Certes des crédits d’aide à l’investissement ont été prévus pour cette année de transition mais leur montant est bien inférieur à la moyenne annuelle des années précédentes, faisant ainsi craindre une décélération de l’investissement local, contrairement à la notion affichée de « relance ».

Ce projet est très attendu par tous les porteurs de projets qui s’impatientent de connaître les intentions de notre département en termes d’accompagnement et de soutien.

 

Votre projet ainsi présenté cet après-midi appelle plusieurs remarques :

Nous pouvons saluer le diagnostic posé du besoin de prendre la mesure des nouveaux défis tels que « le vieillissement de la population, le dérèglement climatique ou encore la fragilisation des jeunes générations ». Oui, les politiques publiques départementales actuelles doivent évoluer.

Nous saluons également le souci d’évaluer régulièrement ce projet départemental pour l’actualiser. D’ailleurs, à défaut d’avoir associé l’ensemble de l’assemblée départementale pour le concevoir, nous espérons que tous les conseillers départementaux seront associés pleinement à la réalisation du bilan à mi-mandat. Car nous sommes tous des représentants légitimes de nos cantons respectifs puisqu’ici nous avons tous remporté l’élection contrairement à certains membres de conseil municipal ou de conseil régional. En procédant ainsi, on s’assurera une prise en compte de l’ensemble du territoire départemental.

 

Concernant l’axe 1 dédié aux jeunes, nous nous interrogeons sur le coût de l’expérimentation que vous voulez porter de revenu de base aux jeunes de 18 à 25 ans qui n’auraient pas accès aux dispositifs existants de par leur statut (comme la garantie jeunes ou les contrats jeunes majeurs). Sans financement de l’Etat, qui serait concerné et combien cela couterait à notre collectivité ?

Concernant la poursuite de la rénovation des collèges, dont le plan a pris considérablement du retard par rapport au projet initial qui allait de 2012 à 2018, vous évoquer une enveloppe de 20 à 25 millions d’euros d’investissement par an. Ce rythme annoncé n’a jusqu’ici pas été constaté si on reprend la moyenne investie chaque année depuis 10 ans. Et s’il est respecté demain, sera-t-il suffisant pour venir au bout du plan initial avant la fin du mandat ? Le doute subsiste même s’il est indéniable que des investissements tant attendus arrivent dans certains collèges.

Vous évoquez le soutien du Conseil Départemental à la construction ou la rénovation d’infrastructures sportives utilisées par les élèves au quotidien. Nous le saluons. Pourriez-vous nous préciser si ce soutien fera l’objet d’un budget spécifique ou s’il viendra en déduction des investissements prévus pour les collèges ou de l’aide à l’investissement pour le bloc communal ?

Concernant les outils et ressources numériques, il conviendra d’associer cette fois-ci les équipes éducatives aux choix effectués pour leur renouvellement.

Vous évoquez « la mise en place d’une politique volontariste en matière de développement des circuits courts ». Je suis étonné car cela avait déjà été évoqué lors de précédents mandats. En réalité, les circuits courts peinent à se développer ici alors que d’autres départements sont plus volontaristes. Ce n’est pas qu’une question d’enveloppe budgétaire mais aussi d’organisation de la restauration collective, de la structuration de ses approvisionnements. Les coopératives agricoles de notre territoire y sont prêtes !

Vous abordez à juste titre la crise des vocations des assistantes maternelles. Mais je m’étonne que vous ne portiez pas la même préoccupation pour les professionnels de la Protection Maternelle et Infantile. Si les postes n’y sont pas pourvus, vous rencontrerez des difficultés à atteindre les objectifs affichés que nous partageons, à savoir notamment le renforcement de la prévention sanitaire précoce.

S’agissant de la protection de l’enfance, vous souhaitez mettre fin à la saturation chronique du dispositif d’accueil départemental. Vous évoquez de nouveaux projets pour l’ouverture de nouvelles places. Concrètement pourriez-vous nous préciser le nombre de places que vous souhaitez créer durant ce mandat ? L’actualité en Ukraine nous invite à anticiper des besoins d’accueil de jeunes réfugiés, peut-être orphelins de guerre.

A propos du sport, de la culture et de l’éducation populaire, nous souscrivons aux objectifs affichés dans votre projet. Il faudra avoir une attention toute particulière aux associations en milieu rural pour leur apporter un soutien adapté.

 

S’agissant de l’axe 2 traitant des solidarités, nous rejoignons les propos de Jean-Marie Schléret. Vous évoquez de nouveaux schémas dont l’élaboration marquera les deux prochaines années. Concernant l’autonomie, il y a urgence et les acteurs ne pourront pas attendre deux années pour que se concrétisent les revalorisations tant attendues. Cela passera par des négociations ou renégociations de CPOM au plus vite pour bénéficier des financements complémentaires. Il faudrait aussi améliorer le pouvoir d’achat des aides à domicile en prenant mieux en compte la hausse du prix de l’essence, même si c’est de manière indirecte.

L’urgence est aussi dans les établissements médico-sociaux qui nécessitent de lourds investissements, je pense en particulier à plusieurs maisons de retraite. Ces travaux ne seront possibles qu’en augmentant le prix de journée. Pour ce faire, notre collectivité doit anticiper une montée en charge plus ambitieuse afin de ne pas freiner ces projets tant attendus.

Concernant la santé et les projets immobiliers de regroupements de professionnels de santé, facilitant ainsi les collaborations de proximité et les parcours de soins, il y a des territoires peu denses où le cahier des charges de l’ARS se révèle parfois inadapté aux réalités territoriales. À l’instar de la région qui a déjà évolué en ce sens, j’invite le Département à ne plus conditionner son accompagnement financier au respect du cahier des charges parfois trop rigides de l’ARS.

De même l’absence de CLS (parfois due à l’absence de volonté du côté de l’ARS) ou l’absence de CPTS (parfois due à des périmètres préconisés par l’ARS ne facilitant pas les collaborations effectives dans la proximité) ne doivent pas conditionner le soutien demain du département à des projets de santé dans nos territoires. Sinon ils seraient alors doublement pénalisés.

Nous partageons avec vous le souci d’aider les aidants dont le rôle est précieux en termes d’accompagnement au quotidien d’un proche en situation de dépendance, en raison de son âge, d’une maladie ou d’un handicap.

Vous souhaitez développer des solutions de répit. A ce sujet, des projets prometteurs et complémentaires pourraient voir le jour notamment à Flavigny-sur Moselle, Blainville-sur-l’Eau et Cirey-sur-Vezouze par des porteurs autres que le Conseil Départemental. J’aurais besoin de précisions concernant vos engagements : êtes-vous prêts à soutenir financièrement en fonctionnement des maisons de répit qui seraient développés par exemple par des associations ? Le cas échant, quel modèle de financement envisagez-vous ?

Cela étant demandé, nous ne pouvons que vous rejoindre sur la nécessité d’une réforme structurelle nationale de l’accompagnement de l’autonomie et regretter avec vous l’abandon de la loi grand âge durant ce quinquennat.

S’agissant de la pauvreté, alors que notre département était en pointe avec l’Etat, le résultat est décevant. Il en va de même pour l’insertion même si la responsabilité n’incombe pas uniquement au Département.

Pour autant, il ne faut pas renoncer à vouloir sortir un maximum de Meurthe-et-Mosellans de la pauvreté. Nous sommes convaincus que les plans successifs ne suffisent pas. Il faut aussi porter une ambition de développement territorial. Ces deux axes doivent être liés. Vous admettez qu’il faut – je cite – « renforcer encore les actions offrant des opportunités aux bénéficiaires du RSA d’être mis en situation d’emploi, tout en bénéficiant d’un accompagnement adapté ». Nous croyons dans une politique plus incitative.

Par ailleurs, nous soutenons vos engagements pour mieux protéger et soutenir les victimes de violences.

 

S’agissant de l’axe 3 concernant la transition écologique, des progrès indéniables ont été opérés. Vous nous annoncez là encore des plans comme sur le paysage ou le vélo et des schémas comme sur l’eau. Cela suscite beaucoup d’espoirs.

Nous espérons ainsi que dans un souci de cohérence vous protégerez des paysages remarquables d’éoliennes qui viendraient les défigurer à l’instar des environs de la colline de Sion ?

S’agissant des espaces naturels sensibles, il serait pertinent d’actualiser les données et peut-être d’envisager de labéliser d’autres ENS départementaux dont les spécificités environnementales le justifieraient. C’est une question non seulement scientifique mais aussi de justice et d’équité territoriales.

 

Concernant l’axe 4 intitulé « soutenir la dynamique et l’attractivité de nos territoires », nous avons là aussi énormément d’espoirs alors que l’attractivité de la Meurthe-et-Moselle avait disparu des préoccupations de notre département. Votre lecture de la loi NOTRé semble différer de celle des départements voisins qui ont continué à chercher à attirer des investisseurs avec des agences d’attractivité. Pourriez-vous réinterroger vos possibilités d’intervention au regard de ce qui peut continuer à se pratiquer ailleurs.

Vous évoquez le département, « garant des solidarités de proximité, au service de tous les territoires ». Pourtant la viabilité hivernale est à plusieurs vitesses, certains tronçons de routes départementales n’étant pour certains jamais déneigés ou trop tardivement. J’ai eu l’occasion de vous faire des propositions afin de mieux traiter les communes rurales. Espérons que vous acceptiez de les étudier, voire de les adopter pour vraiment améliorer l’accessibilité en toute sécurité de nos territoires ruraux.

S’agissant des infrastructures routières, à ma grande surprise, vous ne mentionnez pas le projet de contournement de Saint-Nicolas-de-Port pourtant traversé par près de 1500 camions par jour et alors que les accidents se multiplient sur le passage à niveau 129 entre Laneuveville-devant-Nancy et Ville-en-Vermois. Pourriez-vous nous rassurer sur votre volonté de faire aboutir ce projet tant attendu par les riverains.

Rien non plus sur la RN4 alors qu’elle est fondamentale pour le développement de l’est lunévillois. Pourriez-vous également nous rassurer sur les intentions du département qui a pourtant co-financé 10% des études sur le dernier tronçon. Il ne faudrait pas que cet oubli dans le projet départemental se traduise en impasse budgétaire, synonyme d’enclavement territorial durable.

Concernant le futur dispositif d’appui aux territoires, il n’est qu’annoncé sans aucune précision à ce stade. Des communes en seront-elles encore exclues puisque la moitié aujourd’hui n’ont pas le droit à une dotation communale d’investissement ? Nous avons concerté les élus locaux et les attentes sont fortes. Allez-vous nous associer à l’élaboration de ces nouveaux CTS ? Il nous semble essentiel de rétablir de l’équité territoriale en rendant éligibles l’ensemble des communes de notre département, bien sûr en proportionnant. Nous devons également gagner en lisibilité dont souffre cruellement le fonds d’investissement départemental créé récemment.

Concernant l’habitat, nous appelons également à rétablir une certaine équité territoriale. Il me semble important que les investissements soient mieux répartis dans notre département.

Enfin, je ne reviendrai pas sur notre souhait réaffirmé lors de nos précédentes sessions que la restauration du château de Lunéville s’accélère réellement d’ici la fin du mandat.

Vous le voyez mes chers collègues, il reste encore beaucoup à travailler pour améliorer ce projet départemental. Nous appelons de nos vœux un travail concerté avec les représentants de tous les cantons pour n’oublier personne et faire réussir notre département de Meurthe-et-Moselle.

 

Thibault BAZIN