Session publique du 12 décembre 2017.
Intervention de Michel MARCHAL :
(Conseiller départemental du canton de Baccarat)
Monsieur le Président, mes chères et chers collègues,
Face aux nouvelles demandes des citoyens, les services publics paraissent souvent inefficaces. De plus, la rationalisation des dépenses publiques a imposé la fermeture de certains d’entre eux.
Sont particulièrement concernés les quartiers populaires, les campagnes périurbaines et surtout les zones rurales.
L’accessibilité aux services est essentielle pour assurer l’attractivité et le dynamisme des territoires. Cependant, ces services n’ont pas obligation à être figés. Par contre, ils doivent s’adapter aux modes de vie d’aujourd’hui. Ce doit être une remise en cause permanente.
Partant d’un constat de carence, la loi NOTRé a décidé de rendre obligatoire l’adoption de schémas départementaux d’accès aux services.
1e constat : dans notre pays dès qu’un problème apparait on propose un schéma, un plan. Cela calme les attentes et démontre que l’on se préoccupe du sujet ou des sujets.
2e constat : décret d’application date de 6 avril 2016. Environ 2 ans. Réactivité.
3e éléments : les services aux publics peuvent et doivent évolués tout comme la société pour être en phase avec les besoins.
Comme le prévoit la loi, le département a organisé ce schéma, en coordination avec le préfet, après avoir établi un diagnostic exhaustif de l’accès aux services sur le territoire.
Pour être efficace, ce schéma doit engager tous les opérateurs, publics ou privés, qui assument une mission d’intérêt général sur notre département. Ce sont eux qui auront à organiser les services au public sur notre territoire.
Le diagnostic réalisé par le cabinet d’étude a dû prendre en compte l’ensemble des services publics locaux ou nationaux. Je pense en particulier, aux transports, à la couverture numérique, aux commerces, aux services de l’état, aux services de santé, de sécurité, aux services sociaux et de l’emploi, à l’éducation, aux sports et à la culture.
Concernant le cabinet d’étude nous pouvons considérer qu’il a dû effectuer un copier-coller des autres départements puisqu’il a travaillé dans un grand nombre de collectivités.
Pour favoriser l’accessibilité des services et afin que les usagers sachent toujours à qui s’adresser, la coordination et la complémentarité de l’offre doit être assurées dans tous les secteurs.
Ce schéma répond-il aux attentes de nos concitoyens ?
A la lecture de ce rapport, j’ai le sentiment que règne une certaine autosatisfaction de la part de notre collectivité !
L’enquête, base élémentaire à l’élaboration de ce schéma, aurait mobilisé 1.100 personnes. Vous revendiquez une large consultation ! Personnellement je trouve cela relativement modeste. C’est 0.15% de la population.
Cela ne remet pas en cause le diagnostic que nous partageons avec bien évidemment des particularités territoriales fortes peut être pas mises suffisamment en évidence.
Ce diagnostic fait apparaitre une classification des services selon leur importance et leur performance. Les plus importants et les plus performants sont les services liés à la santé et la sécurité des personnes. Les boulangeries, les écoles, les collèges, lycées sont aussi considérés comme important.
Les transports en commun, les services à domicile, l’hôpital, la poste, les gares mais aussi les crèches sont une demande forte. Ils sont considérés comme peu performants.
Dans le peloton de queue les personnes enquêtées jugent pôle emploi, les sous-préfectures peu importantes. Elles manifestent également peu d’intérêt pour les maisons départementales des solidarités.
Ce qui est intéressant dans cette enquête c’est la perception des RSP (relais services publics) structure pourtant considérée, par l’État, comme étant l’outil qui permet le désenclavement des populations. Ces RSP, voulu par l’État il y a maintenant 10 ans sont pratiquement inconnus du grand public. Plus de 60% des personnes enquêtées ne savent pas s’il en existe un sur le territoire. Ce qui est doublement inquiétant c’est qu’avant même les conclusions de ce schéma, l’État s’est empressé, de débaptiser ces RSP et d’en faire des MSAP (maison des services au public).Bouleversement inutile mais couteux puisque nous avons changé toutes les enseignes.
Pour bien connaitre le fonctionnement de ce type de structures puisque nous en avons une sur le territoire de ma communauté de communes je peux vous dire que sur les 200 personnes qui interpellent, chaque année, la MSAP environ la moitié le font pour des problèmes relatifs à la CAF. Bien souvent ce sont des problèmes de compréhension qui pourraient trouver des solutions dans une simplification des règlements de la CAF. Je n’ai pas vu dans le schéma une telle proposition ! Je l’avais pourtant évoqué à plusieurs reprises dans le cadre des comités de pilotage. L’efficacité passe aussi par une remise en cause de certains services.
Je ne vois pas non plus dans ce schéma une demande que j’avais formulée, à savoir l’installation de distributeurs de billets dans les zones non pourvues et l’engagement de leur maintien dans les territoires peu denses.
C’est donc à partir des éléments issus de l’enquête que nous devons établir le schéma. L’enquête portait sur 9 grands domaines de service marchands ou non marchands. Avoir associé à l’élaboration de ce schéma l’ensemble des EPCI de ce département devait nous permettre d’approfondir les spécificités des territoires.
Pour avoir participé à toutes les réunions je peux témoigner de la désertion progressive des élus et plus particulièrement ceux qui représentaient les territoires les plus éloignés des services. J’en ai fait la remarque. Cela n’a inquiété personne ! Nous avions affaires à un comité de pilotage d’initiés et surtout de représentants des services convaincus de détenir la vérité et la solution. Si vous doutez de mon affirmation, au sujet de la participation des élus, je vous invite à consulter les fiches de présences à ces réunions. Nous sommes très éloignés de l’esprit de la mise en place du schéma. Comment bâtir un projet nécessaire et indispensable, sans les représentants des territoires ?
Le vote des communautés de communes est révélateur. Il corrobore mon affirmation. La moitié seulement des EPCI se sont prononcé et ont débattu. Alors que l’enjeu est énorme, nous pouvons considérer que ce projet de schéma a laissé indifférent un grand nombre d’élus territoriaux.
L’analyse que je peux en faire c’est que les discours, d’en haut, sur l’aide aux territoires et à la population n’impriment plus. Je pense aussi qu’il est bon de mettre en parallèle la participation et le vote extrême des habitants de ces territoires abandonnés aux différentes échéances électorales. Et selon que vous soyez en zone urbaine ou en zone rurale, l’accessibilité aux services est totalement différente.
L’enjeu est aussi et surtout de redonner confiance aux territoires.
Le schéma qui nous est proposé répond-il à toutes ces attentes ?
Les 6 orientations et les actions qui en découlent caractérisent précisément les besoins.
Par contre, à la lecture des fiches actions, pour un grand nombre de projet tout reste à faire. Je prendrai l’exemple de la mobilité. Dire que la mobilité doit être une priorité cela ne surprend personne. C’est dire comment on développe une mobilité efficace qui surprendrait. Malheureusement comme sur beaucoup d’autres sujets le schéma identifie parfaitement les besoins du territoire mais il n’apporte pas de solutions concrètes et satisfaisantes. C’est plein de bonnes intentions évasives. Le schéma n’oblige personne.
Je ne remets pas en cause la réalisation de ce rapport qui pour ma part ne fait que de lister des actions. Il ne dit pas comment on les réalise et avec quels moyens.
Par contre je suis très réservé sur la sincérité de l’engagement de l’État.
Alors que nous élaborons un schéma pour améliorer l’accessibilité aux services, l’État s’empresse de diminuer les heures d’ouverture des sous-préfectures, des classes sont supprimées sous la brutalité des ratios d’effectifs. Des gendarmeries disparaissent.
Des collèges ruraux ferment pour des économies budgétaires. Les commerces, après avoir tiré le diable par la queue, tirent le rideau. Les banques abandonnent la ruralité. La poste se désengage. Les transports en commun ont disparu depuis longtemps. Les médecins partant à la retraite ne sont pas remplacés. Les hôpitaux ruraux sont menacés en permanence.
Le maintien et l’efficacité des services passent pour une démarche de solidarité. Les habitants en capacité d’avoir accès à ces mêmes services sur d’autres territoires, doivent prendre conscience que leur démarche fragilise ces services locaux.
Madame et messieurs, c’est cela la réalité de nos territoires !
Le schéma va-t-il enrayer tout ce désengagement et fera-t-il revenir tous ces services disparus ? J’en doute !
Michel MARCHAL